1. La question de la localisation

La mondialisation de l'économie a un impact direct sur la manière dont les entreprises conçoivent leurs choix d’implantation. Pourtant, alors qu'il est de bon ton d'insister sur la disparition des barrières géographiques, on constate que les choix de localisation des entreprises restent fortement influencés par des facteurs locaux d'attractivité.


Qu'est ce qui influe les entreprises à choisir un endroit plutôt qu'un autre ? Quelle stratégie de localisation pour les entreprises ?


Quand on parle de "village planétaire"


La globalisation des économies est souvent vue comme l’avènement d'un "village mondial" dans lequel la distance et les frontières géopolitiques séparant les agents économiques n'auraient plus d'importance.


Nous allons entamer cette démonstration par l’étude des choix internationaux possibles accompagné par l’effet de « dumping social ».

Ensuite, nous allons étudier le choix interrégionaux avec en premier lieu la stratégie « centré ». Cette stratégie est très primée aujourd’hui.

Ensuite nous travaillerons sur la stratégie « excentré » qui fait de bon compromis entre compétitivité et croissance.


Une entreprise, pour s’installer, prend en comptes différents paramètre, nous avons identifié 9 paramètres qui sont majeurs dans les décisions.


- La main d’œuvre : son coût, sa qualité, sa quantité et sa fidélité sont des caractères à prendre en compte pour le choix d’une installation.

- L’environnement : la quantité de fournisseurs, les biens intermédiaires.

- L’aménagement : ceci concerne toute l’infrastructure, présence d’un port, d’une autoroute, d’une voie ferrée, d’un aéroport.

- La présence de la concurrence : elle peut gêner ou au contraire encourager des entreprises lors d’un choix d’installation
- Les lois : fiscales, sociales, les aides proposés par l’administration publique

- Le prix du terrain : il rentre dans les coûts et donc est non négligeable

- La monnaie : elle pose des problèmes dans ses variations monétaires pour les entreprise lors de l’import exports. Entre le moment de l’achat et l’arrivée de bien et du service, le cours de la monnaie a pu varier ce qui rend l’achat (bien intermédiaires) /vente (produit final) plus difficile à maitriser.

- Les transports : ils sont des couts non négligeables d’une part pour importer les biens et services des fournisseurs et ensuite pour exporter des biens et services vers le marché

-La proximité du marché : ce facteur détermine les coûts de transports et le temps entre la commande et l’arrivée du bien ou du service sur le marché final.




Exemple d'infrastructure : une plateforme multimodale

   Selon certains économistes, la proximité du marché est le facteur le plus déterminant. Mais cette idée est contredite historiquement par l’arrivée des entreprises en Chine. A l’époque le marché n’était pas aussi prometteur qu’aujourd’hui. Les entreprises ont surtout décidé de s’implanter en Chine pour la main d’œuvre.

La stratégie dite "centrée" : C'est le fait que les entreprises choisissent de s'implanter dans de grands bassins économiques. Les plus grands bassins économiques sont : Le Wuhan (Chine), la Silicone Valley (Etats unis), la Ruhr (Europe), la mégalopole japonaise.
La stratégie dite "excentrée" : C'est le fait que les entreprises choisissent de s'implanter en dehors de grands bassins économiques, dans des zones peu denses.

Le "dumping social" : C'est le principe de concurrence au sein de la main d'œuvre. Le dumping social se caractérise par une baisse des salaires dans une zone par rapport à une autre. L’effet de « dumping social » le plus connu est celui des pays émergents. Certaines personnes considèrent ce phénomène déloyal.

Bassin économique : Zone à forte densité en entreprises et en population.

Exemple de bassin économique.


      Le dumping social, un effet qui pousse les entreprises à délocaliser.

   Le « dumping social », nous l’avons dit, est le phénomène de concurrence au sein de la main d’œuvre, cela signifie que les salaires seront différents suivant les zones géographiques du globe. C’est-à-dire, que cette concurrence peut être aussi bien inter-régionale que internationale voir intercontinentale. Lors des parties suivantes, nous allons étudier un choix inter-régional. Avant de s’intéresser à celui-ci nous allons nous intéresser aux choix internationaux et intercontinentaux. Tout d’abord, on peut faire deux distinctions dans ce « dumping social » D’un côté, les pays émergents et de l’autre, les pays développés.


   Dans les pays développés, on retrouvera surtout la main d’œuvre qualifiée. Celle-ci sera par contre, quelle que soient les qualifications, plus chère. Ces pays sont attractifs par leur modernité, ils proposent aux entreprises des moyens de communications et de transports plus efficaces. Les pays développés sont aussi les plus grands consommateurs, s'y installer est donc très favorable au développement. Par contre, les lois imposées par ces états sont plus restrictives. Non seulement ces lois rendent la main d’œuvre encore plus chères mais elles rendent les décisions des entreprises plus difficiles et donc plus coûteuses. Dans les pays développés, la défense des salariés est plus forte, ce qui rend tout changement plus difficile notamment dans les salaires. De plus avec des syndicats influant, en générale les conflits sont répétés. Par contre, l’avantage pour l’entreprise s’installant dans des pays développés est l’image qu'elle transmettra au public . Une entreprise affichant un « made in France » sera toujours mieux perçu qu’un « made in China » même si le produit fabriqué en France serait de moins bonne qualité, la majorité des consommateurs préféreront des produits français à des produits chinois.

   Les pays en voie de développement sont moins réglementés, ils ont très peu de lois sociales et les salariés ne sont pas protégés par des syndicats comme en Europe. Ces pays émergents ont besoin d'entreprise importantes telles les multinationales qui pourrait leur offrir des emplois. Non seulement les lois sont plus flexibles mais les gouvernements des pays en voie de développement sont dépendantes des entreprises. On observe une pression des multinationales qui influenceront les états et leur lois. Cette « dictature » est illustrée par la catastrophe de Bhopal en Inde (3 décembre 1984) c’est la catastrophe industrielle la plus tragique de l’histoire. Il s’agit d’une entreprise de chimie : Union Carbide. L’usine a explosé dégageant 40 tonnes d’isocyanate de méthyle, un produit chimique très dangereux. Cet accident fit 3500 morts officiellement mais selon les associations elle aurait fait entre 20 000 et 25 000 morts. Les cadres dirigeant l’entreprise ont réussi à fuir aux Etats-Unis et leur extradition a été refusée. L’état Indien poursuivit l'entreprise en justice et celle-ci ne versa uniquement que 500 dollars par victime ce qui est minime par rapports aux dégâts occasionnés dans le pays. Dans les pays en voie de développement, même en Inde, les grandes entreprises ont le pouvoir de contrôler les lois pour maximiser la production sans tenir compte des conséquences et des normes. Cette main-mise sur le pays permet de fixer des taux de salaires très bas mais en échange cette main d’œuvre n’est peu voire pas du tout qualifiée (si l’on excepte le cas extrême de l’inde pour l’informatique).

 Ce dumping social est souvent critiqué. Selon l’INSEE, ce phénomène aura provoqué la perte de 330 000 emplois. Mais ce chiffre est inexact. L’américain Adrian Wood, dans son livre North-South Trade, Employment, and Inequality: Changing Fortunes in a Skill-Driven World explique que ce chiffre avait atteint une moyenne de 9 millions d’emplois supprimés dans les pays développés. Nombreux sont les économistes qui lors de leurs études sur la progression du chômage se sont retrouvés à étudier ce phénomène. Plusieurs théories sont apparues comme quoi le chômage était uniquement dû à la mécanisation du travail. La théorie la plus intéressante est celle de Robert Reich : il montre que le chômage est dû à 3 phénomènes : la robotisation, la désyndicalisation et le « dumping social ». Pour résoudre le problème de « dumping social », M. Reich propose de donner des subventions pour les entreprises s'installant sur leur sol d'origine. En contrepartie, pour les pays en voie de développement, il faut leur permettre d'établir leurs savoir-faire, en installant notamment un meilleur système éducatif. Cette question de "dumping social" est toujours présente, l'OMC (l'Organisation Mondial du Commerce) réfléchit toujours au système qu'il faudrait mettre en place.


Membres de l'O.M.C. (Organisation Mondial du Commerce)
 Le « dumping social » peut être vu comme la résultante de la disparition des frontières. Ce phénomène montre qu’aujourd’hui, avec la mondialisation, on retrouve cette notion de village planétaire. Cette notion est d’autant plus vraie pour les entreprises qui ont maintenant un choix considérable lors de leurs implantations.

 La stratégie "centrée", un esprit grégaire qui donne des zones à fort développement et diversifiées.

   La main d’œuvre dans les grands bassins économiques, présente pour avantage d’être abondante. Lorsqu'elle est disponible et très diversifiée, l’entreprise peut choisir, au moment de recruter, le futur salarié qui conviendra le mieux à ses critères. Ceci est un avantage considérable dans le rapport qualité/prix que procurent les salariés. Une entreprise n’a plus besoin d’embaucher plusieurs salariés pour satisfaire à ses critères et à ses besoins. La grande quantité de main d’œuvre a malheureusement un grand défaut : celle-ci est en effet peu fidèle. Ainsi, les entreprises peuvent perdre énormément avec la formation des salariés. Ces derniers, une fois cette formation terminée, peuvent proposer leurs services à des entreprises concurrentes qui offrent un meilleur salaire. Les employés peuvent également faire pression sur leurs employeurs afin d'augmenter leurs salaires.

   Les grands bassins économiques sont avantageux par la taille de leur marché. Un grand bassin d’emplois possède une zone à population dense et nombreuse. Dans cette zone, le pouvoir d’achat est généralement plus élevé. Il y a donc là-bas une plus grande quantité d’acheteurs potentiels pour les entreprises. Le marché sera alors plus avantageux pour l’entreprise choisissant une stratégie dite « centrée ».

   Dans les grands bassins économiques, nous avons dit que l’environnement était très propice à l’installation des entreprises. En effet, s’il existe un rassemblement sectoriel comme celui de l’automobile, le facteur marché est important pour le choix de l’implantation. Les fournisseurs ont donc tout intérêt à s’installer près de cet ensemble, ceci formant un autre ensemble pouvant engendrer un autre agrégat de ce type jusqu’à qu’il y ait tous les secteurs concernant l’automobile. Il y a donc plus de fournisseurs dans le bassin économique concerné. La présence de ces fournisseurs est un avantage car les pièces ou les matériaux fournis arrivent plus rapidement. Cette rapidité leur permet de mieux ajuster les commandes et donc de mieux gérer le stock et les coûts. Les entreprises peuvent donc utiliser la stratégie du « zéro stock ».

   La concurrence peut être paradoxalement un avantage dans les grands bassins économiques. Elle permet d'apporter une certaine sérénité à l'entreprise. La présence de concurrents permet de rendre l'implantation dans cette zone plus "sûre". L'argument est d'autant plus valable si le concurrent en question est une grande firme multinationale. La petite entreprise qui voudra s'installer sera sûre que cette grande firme aura mis en places des moyens beaucoup plus importants que la petite entreprise serait en capacité de se procurer. Ce sentiment de sûreté peut avoir un effet sur les investisseurs : lorsqu'ils voient que l'entreprise s'installe près de grandes firmes, ils peuvent trouver que c’est un signe de bonne santé chez la petite entreprise. La concurrence a donc un double effet : non seulement l’entreprise est sûre que la future implantation ne sera pas mauvaise mais aussi elle permet de susciter l’intérêt des investisseurs locaux.
Ces deux avantages ont toutefois un coût :la concurrence ralentit le développement de l'entreprise, car elle pousse l'entreprise à faire baisser les prix et donc le revenu généré lors de chaque vente sera plus faible.

   Les transports représentent généralement des coûts assez significatifs. L'autre avantage d'une implantation dans de grands bassins d'emplois est de diminuer ces coûts. Si le produit passe dans une seule usine, les deux seules utilisations de transports seront pour les achats de biens intermédiaires et pour l'envoi du produit vers le marché final. La stratégie dite "centrée" permet de diminuer énormément ces coûts, ce qui rend les entreprises plus compétitives. Si cette stratégie permet de réduire les coûts, ceux-ci augmentent avec le prix du terrain. L'esprit grégaire de ces zones fait monter les prix du m². Il faut donc aux entreprises une grande quantité de capitaux.

   Au final, la stratégie "centrée" présente un intérêt particulier pour les entreprises qui souffrent peu de la concurrence et qui ont besoin d’une main-d’œuvre qualifié et qui sont peu sensibles aux coûts du travail, ou encore celles qui demandent un grand nombre de biens intermédiaires. Même avec ces défauts, cette stratégie reste très utilisée par les entreprises. Elle permet de faire un bon compromis entre croissance et stabilité. Cette stratégie est de plus en plus privilégiée à cause de l’instabilité des conditions géopolitiques et économiques actuelles.

La stratégie dite "excentrée", une stratégie restrictive mais qui propose une échappatoire à la stratégie "centrée".

   Toutes les entreprises ne retiennent pas une stratégie « centrée ». D’autres privilégient plutôt l’installation dans des zones éloignées des marchés. Le choix "excentré" est aussi dû à la concurrence. La stratégie consiste à laisser de côté la compétitivité pour favoriser l’accès privilégié dans ces places excentrées. En s’implantant dans une région moins dense, les opportunités d’embauches sont plus restreintes mais les entreprises peuvent retenir plus facilement leur main d’œuvre pour éviter une dispersion de leur formation et de leur savoir-faire.

   Les entreprises ayant besoin d’une main d’œuvre peu qualifiée ont besoin d'embaucher en masse. La main d’œuvre est moins chère que celle des grands bassins d’emplois. Ceci est dû à la concurrence entre les régions (« dumping social »). C’est pourquoi les entreprises qui demandent peu de qualifications sont attirées par ces zones excentrées. Elles n’ont pas besoin des avantages (sur la main d’œuvre) des grands bassins d’emplois. C’est pourquoi, lors de la fabrication « à la chaîne » au début du 20ème siècle, les usines du secteur secondaire se sont développées dans le nord-est de la France. C’est d’une part parce qu’elles étaient proches des mines mais aussi car elles avaient les avantages de la main d’œuvre qu’apporte la position excentrée. De plus, si elle a un très grand nombre de salariés, elle peut difficilement les conserver dans une même zone. Il faut donc de toute façon établir plusieurs zones d’implantation.

   Pour une stratégie "excentrée", les entreprises doivent supporter un coût de transport élevé car le gros inconvénient de cette stratégie est qu’elle fait un usage intensif des transports. En effet, il est impossible de regrouper toutes les étapes de la fabrication d’un produit dans un seul endroit qui possède une main d’œuvre limité. Par exemple, la fabrication d’une voiture demande une main d’œuvre de qualité très diversifiée. La fabrication du moteur est très complexe tandis que la dernière étape, la vérification demande juste à des salariés d’être méticuleux. L’étape de l’assemblage, s’il n’est pas fait par des machines, nécessite peu ou pas de qualifications. L’entreprise automobile va devoir alors produire le moteur dans un grand bassin d’emplois et va être soit assemblée aussi dans un grand bassin d’emplois (si ce sont des machines qui le font) soit s’installer dans des zones excentrées (si cette étape est faite par des salariés). L’entreprise devra alors faire au moins un trajet entre ses usines pour fabriquer la voiture. Surtout si lors de la dernière étape, la vérification se situe dans une zone à faible population, la demande pour la voiture est alors faible.

   Une entreprise s’installant dans une zone excentrée aura une main d’œuvre plus fidèle. Les salariés vont souvent voir l’entreprise concurrente lorsqu’elle propose un salaire plus élevé. C’est pourquoi, l’entreprise Benchmark Group, en 2001, a préféré installer ses informaticiens à Rennes, lieu où d’une part le coût de la main d’œuvre est moins chère et d’autre part car l'entreprise n’a pas à payer des formations « inutiles ».
Une entreprise travaillant sur des produits peu transportables a tout intérêt à employer une stratégie "excentrée". Pour répondre à la plus grande demande possible, l’entreprise doit produire peu mais dans beaucoup de zones. Il ne lui est pas nécessaire de s’installer dans de grands bassins d’emplois et d’avoir à faire face à de la concurrence.
Un choix stratégique « excentré » développe un accès privilégié car la population développe un sentiment d'appartenance à l'entreprise. Ce phénomène se produit à différentes échelles, comme par exemple avec l’usine de General Motors qui a développé une influence dans la région de Detroit aux USA.




   La stratégie « excentrée » possède donc de grands inconvénients comme le coût de transport ou encore le risque lors de l’implantation. Mais elle reste un moyen pour passer outre la stratégie "centrée". Elle permet, malgré ces contraintes, d’être compétitives dans certains secteur même si ce n’est pas autant que dans de grands bassin d’emplois. Elle permet surtout de mettre un système pour des entreprises très contraignantes telles que l’agroalimentaire

   Les entreprises auront tendance à choisir une localisation « excentrée » si elles emploient fortement une main d'œuvre peu qualifiée et si elles sont capables de supporter des coûts de transports élevés. Cette stratégie est donc une échappatoire possible pour les entreprises ayant des réticences ou une incapacité à suivre la stratégie « centrée ».


Conclusion.

   La stratégie dite "centrée" présente des avantages comme la grande quantité de main d’œuvre, un environnement favorable, la concurrence qui donne des avantages comme des inconvénients et les coûts de transports. Naturellement, si cette stratégie a des avantages, elle a aussi des inconvénients comme le prix du terrain.
   Bien sûr, les entreprises font un mélange avec ces différentes stratégies, en fonction de leur taille, de leur secteur et de leurs caractéristiques.
   Nous l’avons vu, une entreprise fabriquant des automobiles aura tout intérêt à utiliser d’une part la stratégie "centrée" et d’autre part la stratégie "excentrée". Il faut tout de même prendre en compte que, selon le produit en question une entreprise élargira plus ou moins son influence. Pour certains biens et services, il suffit donc à une entreprise de mettre quelques installations dans plusieurs continents pour s'ouvrir au marché mondial. Alors que pour d’autres, il faut aménager des installations dans chaque département pour étendre une influence dans la région. Nous allons donc ensuite travailler sur différents cas d’entreprises pour voir la mise en application de ces différentes théories et connaître pourquoi elles ont faits un tel choix.

Bilan des stratégies interrégionales

Bilan des stratégie internationales